L’accession au rang de première fortune de France (voir ma note du 9 juillet) et le coup de projecteur qui en résulte n’y sont pour rien. Il n’empêche : l’association familiale Mulliez semble enfin prête à assumer publiquement son statut de premier acteur non coté de l’économie française. Elle est en effet en train de mettre en place une structure d’investissement en fonds propres très ambitieuse, Indev. Celle-ci aura pour mission de réaliser des acquisitions et de prendre des participations à long terme dans des entreprises, notamment en dehors des métiers de la distribution. L’objectif est non seulement d’accroître le périmètre économique familial mais également de le diversifier.
L’AFM a confié la direction d’Indev à une personnalité bien connue dans le monde des affaires, Bertrand de Talhouët (photo ci-dessus, ©La Voix Eco), Agé de 43 ans, diplômé de Polytechnique et de l’ENA, ce transfuge du groupe PPR accompagnait François Pinault depuis 1994. Il avait quitté au printemps la direction de La Redoute. D'origine bretonne, il a démarré sa carrière au Ministère de l’Economie, dans le corps de l’Inspection Générale des Finances. Son profil est évidemment très inhabituel chez des Mulliez qui réservent d’ordinaire les plus hautes fonctions à d’anciens chefs de rayon. A l’évidence, ce recrutement et la visibilité qu’il ne va pas manquer de conférer aux premiers pas d’Indev, sont le signe d’une nouvelle ère pour la dynastie roubaisienne.
J’aimerais à ce propos rapporter une anecdote qui en dit long sur le changement en train de s’opérer. C’était il y a deux ans, peu avant la sortie du livre « Le secret des Mulliez ». Apprenant que j’allais publier la liste des entreprises de la pépinière Créadev dans lesquelles l’AFM était actionnaire, Thierry Mulliez, le patron du conseil central familial, m’avait en substance tenu ce langage : « ce que vous faites est nuisible pour ces entreprises. Ca n’est pas les aider que de révéler que nous sommes présents à leur capital ». Manifestement, les mentalités ont évolué depuis et les responsables de la dynastie roubaisienne se sont enfin - un peu - décrispés en matière de communication. En effet, il y a quelques semaines, Créadev a mis en ligne son propre site. On y trouve non seulement la liste exhaustive des start’up et PME dans lesquelles la famille Mulliez a pris des participations mais également des informations sur sa stratégie d’investissements et des détails sur l’équipe qui pilote la structure. En particulier Jérome Mulliez et Séverine Tapié, le frère et la sœur d’un certain … Vianney Mulliez, big boss d’Auchan depuis la retraite de l’oncle Gérard.
Ces derniers mois, les Mulliez se sont rendu à l’évidence qu’il était vain de vouloir à tout prix cacher telle ou telle de leurs activités économiques. Vain et contre-productif. Pour exister, réaliser les bons investissements, un fonds doit avoir un minimum de visibilité. Avancer masqué, c’était se de priver d’une vraie caution. D’ailleurs, en faisant son coming-out, Créadev ne manque pas de mettre en avant tout l’avantage qu’il y a pour les entreprises de leur réseau à être adossé à un tel partenaire. Extrait du site : « S'associer avec Créadev, c'est pouvoir accéder à l'environnement de la fédération d'entreprises de la Famille Mulliez. Ces entreprises forment un exceptionnel réseau de compétences professionnelles et d'occasions d'échanges. »